Les peintres et poètes
Rêva Rémy : Une écriture d'âme
Rêva Rémy est une artiste hors du commun, à multiples talents. Contemplative de la vie, de la nature et de ses secrets, elle en pénètre toutes les dimensions, elle en comprend les subtils langages. Un coucher de soleil la poussera irrémédiablement à peindre à l'âge de trente ans ; un oiseau chantant ou blessé se dirigera vers elle ; le regard d'un enfant et tout ce qui le traverse lui ira droit au cœur. Rêva Rémy est toujours en quête de la lumière, toujours en recherche de connaissance d'un divin dégagé de tout dogme.
C'est la vie dans ses profondeurs qui l'accapare, la captive et qu'elle traduit en œuvres poétiques, graphiques, picturales. Le poète Jean Rousselot l'a remarque et parle de "la somptueuse, instinctive et savante palette de Rêva Rémy". Son œuvre tout entière relie sa poésie et sa peinture par ce qu'elle désigne elle-même comme "une écriture d'âme".
La symbolique de la calligraphie, elle la découvre en Afrique du Nord, en Asie, voyages à jamais inscrits au plus profond d'elle même. Elle réalise de nombreuses créations de gravures, de peintures. Elle expurge l'essentiel ; le trait symbolique devient rai de lumière, signe poétique posé sur le support quel qu'il soit.
Rêva Rémy est née dans les corons du Nord, à Raismes. En elle, grandit le feu sacré de la comédie. Ecrire, jouer, faire jouer, voilà le triptyque théâtral qui l'exalte dès son plus jeune âge. Mais c'est en Algérie, à Mostaganem où elle s'installe avec mari et bientôt filles, qu'elle réalise son rêve.
"Y a l'soleil sur Mostaganem qui court après les fatmas blanches, les gosses en lambeaux qui s'promènent et le grand ciel tout bleu des beaux dimanches[R1]". Elle met en scène avec la troupe "Arts et théâtre", des pièces, telles "Jean de la lune" de Marcel Achard, "les plaideurs" de Molière et tant d'autres. Elle anime le "Club des poètes" de Mostaganem, dont elle est l'un des fondateurs. Avec ses amis, elle édite "les Carnets poétiques nord-africains".
Les paysages et la vie d'Afrique du Nord la marquent pour toujours. "Les couchants pourpres et bleus et mauves et les couchants feu et lilas des soirs d'Algérie parfumée ont d'exaltantes teintes chaudes[R2]…" La lumière est toujours là, blottissant Rêva dans ses bras comme "le toit du monde"(titre d'une de ses peintures).
Cette lumière lui fait prendre les pinceaux à trente ans. Ne pouvant inscrire par des mots l'émotion ressentie, elle saisit cet art, nouveau pour elle. Le poème se transforme en lignes colorées, en masses structurées ; les élans des pinceaux prolongent les gestes de la plume dans "le feu des tendresses" et tant d'autres. Comme impuissante par les mots, trop imprégnée de cette nature qui la subjugue, elle cherche un autre chant, un chant chromatique et graphique.
Bernard Clavel, dans sa préface d'une des très nombreuses expositions de Rêva, écrit : "Ainsi se mêlent harmonieusement une poésie extrêmement sensible et cette espèce de rage de créer, si étroitement liée à la ferveur d'exister que l'art et la vie se confondent ici en un même trait".
Rêva étudie bientôt les techniques de la gravure à l'eau forte. Rentrée en France, à Paris, elle acquiert une presse ancienne, que vous pouvez voir dans son atelier à Ermont. Elle réalise ses essais, ses recherches pour créer des monotypes, des gravures. Elle expose en France, à l'étranger, aux Etats-Unis, au Japon, en Corée. Elle reçoit de nombreux prix et médailles.
Elle a été impressionnée par les écritures arabes, elle l'est encore plus par les écritures asiatiques. Cette nouvelle inspiration transpire dans ses créations, ses grands monotypes notamment. C'est bien d'une nouvelle écriture poétique et calligraphique qu'il s'agit, cette écriture d'âme.
Rêva travaille aujourd'hui sur des radiographies médicales, sur des photos. Elle y pose son inspiration calligraphique, urbaine, paysagiste. Elle y recrée un univers.
Récemment, Rêva a découvert Esparron de Verdon, elle y a ouvert un atelier d'art, et y anime chaque été des expositions, des après-midis poétiques, elle s'exprime aussi à Gréoux les Bains. Ermontoise, elle est sociétaire de l'association "Les Amis des arts". Elle a ouvert son atelier, au public depuis 2003.
Elle vient de "bâtir", c'est sans doute le mot juste, l'association "Poésie, arts et vie" qui a pour but de relier les artistes de toute nature afin qu'ils tracent une chaîne d'amitié et de talents diversifiés. Rêva ne vit pas que dans son univers artistique, elle est extrêmement dynamique, a le sens du matériel et de l'organisation, elle est très constructive, elle sait réunir autour d'elle des personnes qui ont le même idéal. Elle a toujours su constituer des réseaux d'amitié partout où elle a posé son intelligent et sensible regard.
Elle va bientôt fêter ses cinquante années de création picturale. Rêva Rémy a réussi à jouer avec la lumière, à relier le matériel à l'indicible, à peindre tous les silences, à se mouvoir dans l'espace-temps comme un oiseau, à représenter le mystique. Voilà qui est Rêva. Non ce n'est pas tout….
Mais est-il possible de définir une telle personnalité seulement par les mots ? Rêva, il faut la rencontrer.
Templière du Rêve
Templière du rêve
Et bergère de troupeaux blonds
J'avance sur des rives
Où des soleils mordent les dunes
Des baisers.
Casquée de lune, maillée d'argent
Je vais où m'entraîne l'espace
A pas de fée, à pas de feu
Semant sur les rives désabusées du monde
Le sel marin volé aux flots
De mon pays désenchanté.
Templière casquée d'écailles
Templière maillée de désirs prisonniers
Templière vêtue du reflet glacé des nuits antiques
Templière étoilée
Au justaucorps tricoté par des êtres
Qu'au ciel voient les rêveurs
Lorsque les lunes s'illuminent
Templière j'avance
Une fleur d'or entre les dents.
Quand sera venue l'heure de chanter
La grande symphonie des astres calcinés
La fleur d'or
- soleil de mes univers désolés -
pleurera ses larmes de soma, de sojou
d'élixir de liberté
et j'élèverai vers le ciel
la bannière des esseulés
Templiers
Compagnons de l'Unité.
Rêva Rémy